J’ai déjà évoqué ici mon entorse à la cheville, à l’époque je n’avais pas encore repris l’escalade. C’est chose faite depuis cet été, et ça a été difficile après cette blessure, j’avais donc envie de partager ça. Il est malheureusement rare de ne pas se blesser dans un parcours sportif (à défaut de carrière).
J’en profite également pour publier ici ces premières photos d’Australie aux Blue Mountains, et French Mount, où l’escalade n’est pas du tout comme en France, c’est beaucoup de « crack » !
Je me suis donc blessée en tombant du haut d’un bloc, en salle, en mars 2017. D’une « simple » entorse, on s’est rapidement rendu compte que c’était un peu plus grave et que les ligaments étaient touchés. Après trois mois d’immobilisation avec une chevillère, j’ai commencé le vélo en Mai. J’ai également repris le surf à ce moment là, sans me lever de ma planche, juste en mode bodyboard (mais la sensation à l’eau était trop merveilleuse…).
Dès le mois de Mai, j’ai commencé la rééducation à raison de deux-trois séances par semaine chez le kiné. Il en a fallu une vingtaine avant que je ne retrouve une stabilité suffisante, et que les muscles soient forts. À cette époque, ma cheville était encore gonflée (elle l’est toujours un peu). Je n’ai repris l’escalade que cet été, en extérieur, chez moi à Châteauneuf.
Les premières voies ont été particulièrement éprouvantes. Avant ma blessure, je flashais des 6A en tête, parfois même du 6B, et je travaillais le 6C en moulinette. Après, je peinais dans du 5A en moulinette, et plus que physiquement, c’était la peur qui me paralysait. Je n’appréhendais plus mon vertige, je n’arrivais plus à le dépasser par la concentration, et bien sûr – mais ça c’est normal – je n’avais plus confiance en mon pied.
Cet été, j’ai donc grimpé de temps en temps, et ça a été particulièrement démoralisant « d’échouer » dans des voies que j’adorais et que je connaissais par coeur. J’étais dégoûtée, en colère, triste… Je me disais que toute ma progression des années précédentes n’avait servie à rien, que je repartais de zéro, que ça ne valait pas le coup de continuer à travailler, que de toute façon j’avais mal et que j’étais nulle…
ERREUR !
Aujourd’hui, avec le recul, évidemment que non je ne repartais de zéro. J’ai repris les entraînements en salle, sans me bousculer, en apprenant à me faire confiance petit à petit, en remontant en tête sur des voies très faciles d’échauffement. Quand je m’en suis sentie capable, j’ai augmenté un peu le niveau, sans me faire violence, et je commence à retravailler des 6A en moulinette (je les flash même parfois et ça m’étonne moi-même).
Je n’ai certes pas le même niveau qu’il y a un an, mais je grimpe beaucoup mieux, je suis plus forte techniquement et physiquement, ça n’a rien à voir ! Finalement, ces quelques années d’escalade et cette pause obligatoire ont bien servi à quelque chose ! Aujourd’hui, j’ose les dévers, les voies auxquelles je ne suis pas habituées, je ne baisse pas les bras aussi facilement qu’avant.
Et en Australie, je me suis fait plaisir avec des voies en moulinette, mais techniques et effrayantes pour moi. Ça a été un bonheur assez incroyable de réussir à les terminer ! C’est ça ma satisfaction : le plaisir, quelle que soit la cotation. Et je crois qu’il ne faut pas le perdre de vue. C’est normal après une blessure et plusieurs mois d’arrêt de ne pas pouvoir reprendre comme avant. L’important, c’est de faire les choses progressivement, en se faisant plaisir.
Quant au bloc, je n’en ai pas refait, et je ne sais pas si j’en re-grimperai un jour. De toute façon, j’ai toujours préféré la voie donc ça ne me manque absolument pas ! J’ai quand même un petit challenge pour 2018 : terminer le grand dévers de Pantin… Stay tuned !
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Vous aviez été plusieurs à réagir sur l’article au sujet de l’entorse. Je serai assez curieuse à nouveau de savoir comment vous avez géré la reprise du sport après une blessure, si vous suiviez un programme ou votre ressenti notamment…
Salut Noémi,
Article très intéressant et qui m’interpelle car étant moi-même tombée en bloc à Fontainebleau l’année passée, tout en étant assez débutante. Je suis tombée sur le dos, j’ai eu très peur et je dois dire que c’est principalement cette peur qui me freine maintenant, plus que mes capacités physiques ou techniques. Je pense à la chute directement, alors que je n’avais jamais chuté auparavant, et n’avais jamais eu peur non plus. L’exploratrice Sarah Marquis écrit dans un de ses livres que la peur de la douleur fait plus mal que la douleur, et est donc plus paralysante. Dans mon cas, cela s’applique complètement.
J’ai pris beaucoup de temps à me remettre au bloc. J’ai fait des séances d’osthéo, du yoga, et du core barre pour remuscler mon dos. En m’écoutant, j’ai en fait réalisé que ce n’était pas vraiment pour moi. C’est ok en salle, et si ce n’est pas trop haut, juste pour peaufiner des prises ou s’exercer, ou juste décompresser, mais cela s’arrête là. J’y vais encore de temps en temps mais le but est de pouvoir aller grimper en voie dehors bientôt, et laisser le bloc de côté.
Un petit peu différent, puisque ce n’était pas la reprise après une blessure, mais la reprise de la danse après mon hospitalisation pour anorexie. Avant la maladie, j’avais plutôt un (très) bon niveau, loin d’être pro, mais je prenais des cours quasiment tous les jours et j’avais systématiquement des rôles importants dans les galas qu’on faisait.
J’ai repris une première fois la danse quelques semaines après ma sortie de l’hôpital (un an d’arrêt environ) et ça été une véritable épreuve. Au delà d’avoir perdu en technique, en musicalité et en expression scénique, j’avais aussi repris des kilos, donc je devais m’habituer à un nouveau reflet dans le miroir. Ça a été très difficile, et quand j’ai déménagé à Paris, j’ai été incapable de me résoudre à recommencer. Reprendre la danse avec la prof qui m’avait vue évoluer, en ayant son regard bienveillant sur ma reprise, oui, atterrir dans un cours où je ne connaissais personne et où je n’avais que mon reflet sur lequel m’appuyer : impossible.
J’ai mis beaucoup de temps à reprendre, je rentrais chez mes parents de temps en temps, j’en profitais pour retourner dans mon ancienne école de danse, mais ça restait toujours difficile.
Et puis j’ai eu un jour une discussion avec mon ancienne prof de danse, à la suite de laquelle j’ai compris qu’il « suffisait » que je décide de prendre la danse comme une nouvelle passion, pas comme la reprise d’une ancienne passion dans laquelle j’étais douée. J’ai arrêté de porter des lentilles en cours, pour arrêter de me focaliser sur mon reflet et essayer de retrouver des sensations. C’est un peu bizarre, mais c’est probablement comme ça que j’ai réussi à avancer !
Aujourd’hui, ça fait 3 ans que j’ai repris de manière régulière, un ou deux cours par semaine, avec une prof extrêmement bienveillante qui met au coeur de son enseignement le bonheur qu’on peut avoir en dansant, et pas du tout la technique.
Ça a été un vrai long cheminement, mais aujourd’hui, si je n’ai pas retrouvé mon niveau d’avant, je m’amuse mille fois plus en dansant (toujours en me voyant flou dans le miroir) et j’ai appris à apprivoiser différemment mon corps.
Bref, je crois que dès qu’on est confrontés à un arrêt brutal et une reprise, c’est important d’essayer de trouver une autre approche, pour ne pas systématiquement rester sur « l’avant ». Même si c’est plus facile à dire qu’à faire, oui !
Je crois que j’avais du laisser un commentaire sur ton article parlant de ton entorse. Je me suis cassée un os de la main au roller derby il y a plus d’un an, la première fois que je me cassais quelque chose et la première vraie blessure après 2 ans de roller derby. « L’avantage » quand on se casse la main dans un sport où on utilise ses pieds fait que je n’ai pas eu à réapprendre à patiner. La difficulté de la reprise a surtout été dans ma tête.
J’ai commencé à retourner aux entraînements avant d’avoir l’autorisation de remonter sur les patins, d’abord parce que ça me permettait de faire connaissance avec ma nouvelle équipe (je venais de déménager à Berlin quand c’est arrivé) et aussi car ça me permettait de garder le contact avec ce sport et me rappeler l’ambiance et sa convivialité.
Quand j’ai pu repatiné, j’y suis allée mollo, j’avais très peur de retomber. Du coup je ne faisais pas les exercices où on devait se bousculer beaucoup, et je ne faisais pas du tout de match. Puis après une ou deux semaines, l’envie d’en « découdre » est revenue et j’ai recommencé les exercices plus intensifs et à faire des matchs (même si le premier j’étais angoissée et ça me rappelait mon accident). J’étais tombée quelques fois (c’est inévitable) et même sur ma main sans qu’il ne se passe quoi que ce soit, ça m’a rassuré.
Depuis je suis beaucoup plus à l’écoute de mon corps, je ne me force plus autant qu’avant, quand je ne le sens pas physiquement ou mentalement. Je sais qu’un accident, une blessure peut vite arrivée et vu que je veux pratiquer ce sport pendant encore longtemps, je préfère m’arrêter de jouer pour la fin d’un entraînement plutôt que de me blesser et ne pas pouvoir jouer pendant des mois.
J’apporte mon vécu à ton article, j’ai lu ton article la première fois mi-juin quand on m’a diagnostiqué une entorse avec rupture de ligament…. Mais, je ne voulais pas y croire : pas croire que c’était si grave que ça, que ce serait si long et que ma saison pour laquelle j’avais de multiples objectifs ( trail et escalade) avait à peine commencé et était déjà fini… Je ne croyais pas les médecins avec leur 8 semaines sans sport (en tout cas sans mes sports préférés) et pourtant….
7 semaines après je relis ton article avec une attention très différente !!! Et l’histoire ayant tant de similitude, je voulais la partager… Comme toi, avant l’entorse j’étais dans le 6a/6b, cote que je voulais asseoir cette année !!! Et j’avais quelques objectifs sur des trails de 30km !! J’ai très mal accepté cette blessure car (comme toi je crois aussi) j’ai la sensation d’avoir déjà donné : 2015 fracture tibia-péronée avec opération, pose de matériel, immobilisation, bref cela m’a pris une très grosse année de reeduc, deux opérations et une bonne bataille avec moi même… Pour me mener à une très bonne reprise, plus de technique, des séances de ppg régulières, une prise de conscience et un bon épanouissement sportif que je savourais car je sais à quel point c’est précieux.
Bim 3 ans après re-blessure… Cela me questionne évidemment : ma pratique n’est pas adapté à mon corps ? Qu’est ce que je n’ai pas compris que la vie voudrait me faire comprendre…. Des questions auquelles, je ne trouve pas encore réponse…
Niveau pratique, j’en suis à ma quinzième séance de kiné, j’ai fait durant ces 7 semaines beaucoup de vélo… Et depuis une semaine, j’ai remis mes chaussons et j’ai pris ma grosse baffe : d’une part c’est dur (les torsions et transferts de poids sont galères), d’autre part impossible d’y prendre plaisir…
Comment se dire que c’est plaisant de galérer dans une voie dans le 5 en moulinette ? Mon homme, super patient et motivé pour moi me pose de jolies moulinettes, me prends bien sec en permanence ( car mon pied ne supporterai pas un micro vol pour le moment)… A la fin de la voie avec un grand sourire me dit « c’est cool, bravo, tu n’as pas trouvé ce caillou trop beau ??? »… A moi de répondre en faisant la gueule que » non c’est pas cool, que c’est tellement dur pour le moral que je ne suis même pas capable de dire si le caillou est beau…. Que je ne vibre pas du tout… Mais que je tremble ! « . Il me manque tout ce que j’aime dans la grimpe : le geste technique, chercher la voie qu’on a envie de faire aujourd’hui, la grimpe en tête (c’est ce qui me manque le plus) qui m’apporte cette concentration inexplicable et cette sensation de liberté, le challenge de faire la croix (ou pas !!).
Voilà, après la première grosse déception, j’y suis retournée mais que sur de petits sites école avec mon homme. Et je ne me dis pas « tiens ce soir on va grimper » mais « ce soir je me fais une séance de réeduc », ça passe mieux comme cela car je n’ai pas l’impression de grimper. Même si je sais que la zipette me ferait perdre à nouveau deux bonnes semaines, je préfère mouliner dans du 6a en tirant les dégaines que dans du 5a n’importe comment… Ca passe mieux comme cela aussi ! Prochaine étape, repartir sur des sites qu’on aime bien avec les copains (car maintenant avec des bâtons je peux envisager une marche d’approche).
Pour ce qui est du trail, je crois que je ne pourrais pas faire de course cette été, peut-être à l’automne… Je n’ai pas encore couru, je pense m’y mettre semaine prochaine avec les conseils de ma kiné : sur du plat uniquement le premier mois ( pas facile à trouver chez moi !) en commençant par une minute de course et une minute de marche sur 10 minutes… je démarre à 8 semaines c’est-à-dire mercredi prochain… enfin j’espère !
Voilà où j’en suis, me reste du boulot autant sur le plan physique : cheville ; que dans la tête : accepter l’évidence, se motiver pour reprendre différemment mes activités et surtout retrouver mes sensations de plaisir, de liberté….
Ton commentaire me touche et je serais très curieux de savoir quelle a été ton expérience de reprise avec le temps. As-tu retrouvé ton niveau, ou plutôt et c’est plus important tes sensations au niveau des transferts de poids, des adhérences. Bref tout ce qui fait que j’adore l’escalade.
Je te pose la question parce que ce samedi j’ai fait une grosse chute dans la chaîne des Gastlosen, proche de chez moi. J’ai réceptionné au sol après une chute de 4m. Les 2 chevilles sont sérieusement touchées, niveau 2 et 3, donc les ligaments aussi. Le diagnostic n’est pas encore posé, ce sera semaine prochaine. Je dois dire que ton témoignage me démoralise un peu, raison pour laquelle je voudrais bien savoir si tes sensations sont ensuite revenues. Je n’ai qu’une chose en tête, reprendre cette escalade que j’aime tant. Je commençais à pouvoir enchaîner en 7a rocher, partir en longues voies jusqu’au 6C. Bref, je suis prêt à beaucoup d’efforts pour retrouver cette satisfaction.
Merci :-)
Je préfère faire de la voie moi aussi! Et oui, tu as raison, tu ne repartais pas à zéro. Tu avais de la technique et de la force.